Un couple comme les autres
Ils sont tranquillement assis dans le canapé lorsqu’ils commencent à entendre le brouhaha de la foule. Un an que cela dure. Des manifestations, et encore des manifestations. C’est tout de même pas de chance que leur appartement se trouve sur le trajet de ces manifestations là. N’importe quoi d’autre fait aurait pu passer. N’importe quoi.
L’un des deux se lève et tire légèrement les rideaux pour regarder. Toujours les mêmes slogans. Toujours les mêmes arguments. Toujours autant de haine de l’autre. De celui qui n’est pas comme soi. Des mots comme autant de coups de couteau dans ce qui est pourtant leur vie depuis des années.
Oui, il a toujours su qu’il aimait les hommes. Il n’a pas choisi, il n’a pas réfléchi. C’est comme ça. Cela aurait pu être autrement, mais c’est comme ça.
Il se retourne légèrement et observe celui qui partage sa vie et qui est resté à lire dans le canapé. Il est moins atteint par tout ça. Il dit qu’on s’en fout, qu’il y a des cons partout. Lui il arrive à passer au-dessus. En tout cas c’est ce qu’il laisse paraitre.
Oui il a toujours su. Et puis il a fallu un jour l’annoncer à ses parents. C’est drôle quand on y pense. Quand on est un homme et que l’on aime les hommes, il faut l’annoncer. Il faut le rendre officiel. Il faut faire son coming out.
Quand on est un homme et que l’on est attiré par les femmes, il n’y a pas besoin de faire d’annonce. Il n’est pas nécessaire de réunir toute la famille, de prendre un air sérieux et de dire « voilà, je voudrais vous annoncer que je suis hétérosexuel ». Oui quand on est un homme et que l’on aime les femmes, il n’y a pas de cérémonial.
Il se souvient du soir où il a choisi d’en parler à ses parents. Il avait tout juste 22 ans. Il avait déjà vécu des histoires, déjà été amoureux, déjà été malheureux. Et c’était encore pire de ne pouvoir partager tout ça avec personne. Alors il a pris son courage à deux mains et il a annoncé la nouvelle à ses parents. « Papa, Maman, je sais que cela va vous faire un choc, que peut-être cela va vous surprendre, mais je suis homosexuel ».
Sa mère a pleuré. De soulagement. Elle savait bien sûr. Comme lui au fond. Et elle était tellement contente qu’enfin il ose leur en parler. Qu’enfin il leur fasse confiance. Un poids s’est envolé à ce moment-là. Des barrières se sont enlevées.
Tout n’a pas été rose. Certains membres de la famille n’ont pas compris. Il a fallu expliquer. Que ce n’était pas une maladie. Que ça ne se soignait pas. Qu’il était normal. Qu’il était le même qu’avant l’annonce. Le même que celui qu’ils avaient toujours connu et apprécié.
Quand on est un homme et que l’on aime une femme, il n’est pas non plus nécessaire de se justifier, de se défendre d’une quelconque bizarrerie ou anormalité. Ça parait tellement plus simple quand on y pense. Et c’est tellement injuste qu’il en aille différemment.
Alors qu’au final, l’amour est-il autre ? Les sentiments sont-ils moins forts ? Il est amoureux de son homme depuis presque 6 ans maintenant. Il en a aimé d’autres avant, des histoires sans lendemain, des histoires plus longues. Il a quitté. Il a été quitté. Il a souffert. Il a du se relever. Il a dû apprendre à faire sans l’autre. En somme, il ne se sent pas différent de ses amis qui aiment les femmes. Alors pourquoi toute cette haine ?
Les bruits de la rue deviennent plus forts, quasi insupportables. Cela ne s’arrêtera donc jamais ? Et tout ça pour quoi ? Pour une histoire de mariage ? Si un jour ils décident de se marier, cela fera du tort à qui ? Voir son histoire d’amour reconnue et célébrée est-ce un droit réservé aux hommes qui aiment les femmes ?
Il n’a pas choisi d’aimer les hommes. Cela fait partie de lui. Certains lui ont demandé s’il regrettait. Mais regretter signifierait que cela aurait pu être mieux. Mais qu’est-ce qui peut être mieux qu’être soi ? Le regret est associé au choix. Or ce n’est pas une question de choix. C’est juste une question d’amour.
Il s’appelle Max. Il partage la vie de Paul. Ils s’aiment depuis bientôt 6 ans. Ils s’engueulent comme les autres. Ils ont des projets comme les autres. Et un jour ils se marieront s’ils en ont envie, comme les autres. Ils divorceront peut-être. Comme un couple sur deux.
Ce sont deux hommes qui s’aiment. Il n’y a rien de plus ordinaire et de plus banal. Rien au fond qui ne mérite tout ce brouhaha.
A Eric et Sébastien. Je vous dédie ces quelques mots en espérant que tout ce brouhaha ne vous fera jamais douter de la légitimité de votre amour.
Très beau texte, bravo !
Merci bcp !
Oh c’est super beau <3
Merci !!! C’est une belle reponse a la manif du jour tu ne trouves pas ?
Merci pour eux, ça m’a fait pensé à mon ami Eric qui a du vivre ça une fois encore aujourd’hui comme depuis un an…
A chaque fois j’ai de la peine piur ce que ca renvoit aux couples homo….
bravo. j’ai d’ailleurs partagé le texte sur facebook !! j’espère qu’ ça pourra toucher certaines personnes qui pourraient ne pas l’être !!
Je crois qu’un peu de tolerance ne ferait en effet pas de mal de nos jours
Très joli texte encore une fois et merde à tous les intolérants, à tous ces gens qui ne savent pas ce qu’est l’amour, qu’ils aillent se faire foutre (oups, pardon !!)
Bises et bonne semaine.
Tu as bien raison !
Je partage pour tout un tas de raisons… Ils s’aiment et ce ne devrait en aucun cas être gênant !
Ca ne gêne que les esprits étriqués dont au final on ne devrait pas tenir compte.
Je me demande encore en quoi ça gêne les autres! Ils ne peuvent pas les laisser s’aimer? Très beau texte comme toujours!
Oui moi non plus je ne sais pas…. Merci à toi pour le compliment ! 🙂