1 vendredi / 1 nouvelle – Le corneur de pages aux yeux verts, ou peut-être bleus…
Il faut que vous sachiez quelque chose sur moi. Je n’écoute que de la variété française. De tout, de rien. Et quand je suis dans la voiture, je chante !! Je connais des dizaines et des dizaines de chanson par cœur. Je vous laisse m’imaginer au volant chantant du Dalida… Pourquoi est-ce que je vous raconte ça me direz-vous ? Et bien parce qu’hier alors que j’étais dans la voiture j’ai réécouté un album de Goldman que je n’avais pas écouté depuis longtemps et dans lequel figure ma chanson préféré de Jean-Jacques : « Tout était dit ». Ce n’est sans doute pas la plus connue. Et pourtant c’est une chanson magnifique.
En réécoutant cette chanson, j’ai décidé de m’en inspirer pour écrire une nouvelle.
J’espère que cela vous plaira.
Le corneur de pages aux yeux verts, ou peut-être bleu…
Elle est assise dans un coin du café. Comme à son habitude, elle a choisi une petite table au fond sur la droite, endroit stratégique pour épier sans être vu. Sans même lui demander quoique ce soit, le serveur a déposé devant elle un chocolat chaud avec un supplément de lait. Il faut dire que c’est une habituée. Elle vient ici chaque matin avant de se plonger dans les bouquins de sociologie qu’elle lit pour sa thèse. Pendant une heure elle observe. Les gens qui entrent. Les gens qui sortent.
Il y a ceux qui ne prennent même pas le temps de s’asseoir et qui avalent leur café à toute vitesse. Elle se demande à chaque fois comment ils parviennent à ne pas se bruler.
Il y a ceux qui parlent fort, qui semblent connaître tout le monde et qui saluent chaque personne par un sonore « Comment vas-tu ? » suivi d’une claque sur l’épaule. Une de celles qui vous font perdre l’équilibre ou pire recracher votre gorgée si par malheur vous venez d’en prendre une.
Mais aujourd’hui elle n’a d’yeux que pour lui. Un homme qui est assis tout seul à une table avec un roman. Elle lui donne entre 35 et 40 ans. Ou peut-être 30 au fond.
Elle ne le voit que de profil. Elle se demande de quelle couleur sont ses yeux. Verts sans doute. Il a un profil à avoir les yeux verts. Il est absorbé par sa lecture. Elle ne distingue pas le titre de là ou elle est. Un polar ? Un livre de science fiction ? Ou pourquoi pas un roman d’amour ?
Elle se prend à imaginer qu’il pourrait lire le même roman qu’elle. Comme dans une comédie romantique, elle sortirait le sien de son sac. Il tournerait la tête vers elle et s’en apercevrait. Il lui sourirait. Elle rougirait puis l’inviterait à finir son café à sa table. Ils parleraient des heures, sur les livres qu’ils lisent, les films qu’ils sont allés voir. Il voudrait la revoir, elle ferait celle qui hésite et puis finalement lui griffonnerait son numéro de téléphone sur la couverture de son roman avant de rassembler ses affaires et de sortir.
Combien de chances y a-t-il pour qu’il soit en train de lire un ouvrage de Durkheim ? Sans doute aucune…
Elle ne parvient pas à détacher son regard de cet homme que pourtant elle ne connaît pas. Il est séduisant. En tout cas elle se plait à le croire. La courbe de son nez est parfaite. Ce qui sublime ses yeux verts. Elle en est sure ils sont verts. Avec des reflets bleus surement.
Et sa main. Fine et longue. Comme celle d’un pianiste. Peut-être qu’il est musicien. Peut-être qu’elle l’a déjà entendu jouer. Elle a toujours eu envie de connaître un musicien. D’être comme dans la chanson, une groupie du pianiste. Assise au premier rang pour revendiquer une possession. Pour que tout le monde sache qu’il est à elle.
Ou alors il est photographe. Ca lui irait bien photographe.
Elle se demande ce qu’elle pourrait faire pour qu’il tourne la tête vers elle. Pour qu’elle puisse voir ses yeux. Si ca se trouve ils sont marrons en fait.
Peut-être que si elle se levait avec sa tasse de chocolat, elle pourrait faire semblant de trébucher et se raccrocher à lui pour maintenir son équilibre ? Ca le ferait rire. Elle pourrait engager la conversation. Lui dire qu’il a de beaux yeux.
Comment peut-il s’appeler ? Pierre ? Non il n’a pas les cheveux à s’appeler Pierre… Hugo ? Ah oui tiens Hugo…
Il est sans doute romantique. Lors de leur première sortie, il sonnerait chez elle avec un bouquet de fleurs. Il l’embrasserait sur la joue et lui dirait qu’il aime son parfum. Il l’emmènerait au bord de la mer pour de longues balades sur la plage. Puis ils s’allongeraient à même le sable. Elle face à la mer. Lui, la tête posée sur son ventre. Il lui lirait des poèmes. Elle trouverait que c’est beau.
Il doit avoir une voix chaude et profonde. Une de celle qui vous enveloppe comme une serviette au moment de sortir de la douche. Une de celle qui vous colle des papillons dans le ventre au simple son d’un banal « bonjour ».
Il l’appellerait ma douce. Elle détesterait ça mai n’oserait pas le lui dire.
Il repose son livre quelques instants pour répondre à un message. Elle sourit parce qu’il appartient au club des corneurs de page. Dans la vie elle a toujours opposés les corneurs de pages d’un côté et les utilisateurs de marque pages de l’autre. Pour elle, rien de tel que de corner une page quand on s’arrête de lire. Plus spontané. Plus parlant. Quand on referme le livre, il conserve les traces de sa lecture. On peut savoir à quel endroit le lecteur a fait une pause, combien de pages l’ont tenu en haleine…
Depuis combien de temps l’observe-t-elle ? Elle en a perdu la notion. Son chocolat est froid à présent. Le serveur repasse devant elle. Il lui demande si elle veut boire autre chose.
Non elle ne veut rien d’autre sauf qu’il lui dise s’il connaît l’homme qui est assis à la table au milieu du café. Il se retourne. Mais il n’y plus personne.
Sur la table du milieu, il ne reste que quelques pièces de monnaie négligemment posées à côté de la tasse de café vide.
Il est parti.
Et elle n’a même pas vu la couleur de ses yeux.
Humm, on l’imagine aussi savoureux qu’un bon chocolat chaud cet homme aux yeux dont on connait finalement pas la couleur…mais rêver, fantasmer, n’est-ce pas l’essentiel. Comme toujours merci de cette fenêtre ouverte sur ailleurs du vendredi…Oserai-je réclamer la suite de la balançoire??? biz V.
Le retour de clara ce sera pour la semaine prochaine !!! Promis !!! 🙂
Ah oui, encore une chose: sympa de voir que le nom de Durkheim dit encore quelque chose…
C’était la petite note culture du jour !!! 😉
Les vendredis se suivent mais ne se ressemblent pas. Et pourtant j’aime toujours autant cette pause que je m’accorde pour lire tes nouvelles. Encore une fois le plaisir de parcourir tes mots, était là. Et je réclame comme souvent une suite, verts, bleus ou marrons (quoique noirs profond c’est séduisant aussi).
Merci ma petite crevette !! C’est vrai noirs c’est pas mal non plus !!!
Contente d’être ta pause détente du vendredi ! 🙂
Moi je suis sûre qu’il avait les yeux marrons et qu’il lisait un recueil de blagues :p … Je ne suis pas dans une période très romantique …
Merci pour cette jolie nouvelle et bon weekend. Bises
Ouh bah ca va pas toi ??? 🙁
non pas trop plusieurs drames dans mon entourage depuis 15 derniers jours
Je te fais plein de bisous ma belle !!! Je suis désolée pour toi. Je suis la si tu as besoin de parler !
Merci.
C’est une chouette histoire, ça me fait penser à moi plus jeune, j’adorais me poser sur un banc et regarder les gens qui passent et imaginer leurs vies, lui il a une tête à faire ça, elle a deux enfants etc… etc…
Super texte en tout cas 😉
Merci bcp !!! C’est tout à fait le sens de la chanson de goldman !! Contente que cette nouvelle t’ait plu !! 🙂
Avec ce texte et le petit commentaire d’intro, j’ai eu la chanson dans la tête tout du long 😉
Joyeux et sympa, j’aime bien !
Merci pour toutes ces lectures
Je suis ravie que le lien se soit fait entre le texte et la chanson !!!!!!! C’était ce que je cherchais !!! 🙂
Ah ben mince alors, il n’a même pas senti son regard sur lui depuis tout ce temps, c’est bien les hommes ça…
Oups, pardon. J’ai encore été happé par tes mots et j’étais bien loin de la réalité 😉
Et non il n’a rien senti.. C’est triste hein… On ne saura jamais de quelle couleur étaient ses yeux… 😉
Ah quand on observe les gens, j’aime bien personnellement on remarque certaine chose dans leurs comportement: tiens lui a un petit tic, oh elle elle est du genre nerveuse a jouer avec ses cheveux.
Dommage qu’on ne sache pas la couleur de ses yeux :p
PS: j’adore ton nouveau blog !
Merci pour le blog !! Je l’adore aussi !!
Et non on ne connait même pas la couleur de ses yeux !Comme ca tu peux choisir ! 🙂
Normal que tu l’adore !
AH donc je l’imagine avec les yeux bleu avec un soupçon de gris ! 🙂
Ah oui pas mal !! Je prends aussi ! 😉