11 septembre
Il n’y a pas beaucoup d’évènements pour lesquels une écrasante majorité de personnes est en capacité de dire où elles étaient et ce qu’elles faisaient lorsqu’elles l’ont appris. Les attentats du 11 septembre 2001 sur le World Trade Center en font partie je crois.
J’étais dans ma voiture, sur le chemin du retour de la fac. La radio était allumée, sur Europe 1, et j’ai appris. Je me souviens que la première chose que je me suis demandée c’est si mes parents et mon frère étaient en sécurité. Ce qui bien sûr est complètement irrationnel pour un événement se produisant à des milliers de kilomètres de là. Mais c’était comme si ce que l’on nous décrivait n’était que le début. Comme dans les films catastrophe où chaque pays est touché par une catastrophe naturelle. Sauf que ce n’était pas un film. Et tout sauf naturel.
Je me souviens que j’ai allumé la télévision aussitôt arrivée à la maison. Programme unique sur l’ensemble des chaînes. Les tours en feu, la panique, les gens qui sautent des fenêtres. Et puis là, en direct sous mes yeux, une première tour qui s’écroule, puis une deuxième. Je me souviens avoir été saisie de tremblements, puis n’avoir pu retenir mes larmes. Pour ces gens que je ne connaissais pas et ce pays dans lequel je n’étais pourtant jamais allée.
Les images ont empli la maison pendant des jours et des jours, impossible de décrocher. Impossible de penser à autre chose. Difficile de mettre des mots sur cette horreur.
Alors pourquoi aujourd’hui ? 15 ans se sont écoulés depuis. Pourquoi aujourd’hui cet événement me touche à nouveau ?
Parce qu’en avril, j’y étais à New York. Parce qu’en avril, les images virtuelles ont été remplacées par des images réelles, par des souvenirs, par des odeurs.
Parce qu’en avril, le lundi, l’homme et moi avons traversé le Brooklyn bridge à pieds, comme des centaines de touristes en même temps que nous. Parce qu’une fois de l’autre côté, nous avons rejoint le Brooklyn Park et que nous nous sommes assis sur un banc. Face au fleuve. Et là, mon cœur s’est instantanément serré. Face à moi, la Freedom Tower. Face à moi l’espace où se dressaient les tours et qui n’a été comblé par rien. Quand on connaît New York, cet espace vide ne peut que se remarquer.
15 ans auparavant, des gens, des touristes, des New Yorkais étaient assis à ma place, savourant les rayons du soleil et la douceur de l’été encore présent sur New York. Ces gens étaient aux premières loges. Ils n’ont pas pu ne pas voir les avions arriver, les voir s’écraser sur les tours, voir les tours s’écrouler. Là, sous leurs yeux, juste de l’autre côté du fleuve. Vue dégagée, sans aucun obstacle.
Puis quelques jours après nous sommes allés sur le lieu du Mémorial. New York, cette ville de bruits incessants, quelle que que soit l’heure du jour où de la nuit. Sauf à cet endroit. Aux abords du mémorial, le silence se fait naturellement. Les chapeaux et les casquettes s’enlèvent. Tout ceci sans que personne ne demande rien. Ce lieu où il n’y plus rien, si ce n’est les emplacements des deux anciennes tours matérialisés par des bassins gigantesques, taille exacte de celles qui se dressaient auparavant à cet endroit. Tout autour des deux bassins, des plaques de métal avec tous ces noms gravés. Par affinité. Et ça et là, sur quelques noms, des roses blanches. Parce que ceux-là auraient fêté ce jour là leur anniversaire s’il n’y avait eu le 11 septembre.
Chaque matin, très tôt, les familles des victimes, liste à la main, enlèvent les roses de la veille et posent les roses de ceux qui auraient fêté leur anniversaire
Et puis un plus loin, un arbre parmi d’autres. Un arbre entouré de barrières. Jalousement soigné et protégé. Un arbre qui a poussé à travers les débris des tours. Un arbre déraciné par les tempêtes ayant frappé New York dans les années suivants le drame. Un arbre ramené à la vie à chaque fois. Un arbre qui envers et contre tout tient bon.
15 ans se sont écoulés. Mais depuis j’y suis allée. Et ça, oui, ça change sacrément les choses.
Attentats du 11 septembre 2001 – 2977 morts dont 2606 pour l’attaque du World trade Center.