Résultats du concours de nouvelles « Des mots pour Librinova »
Il y a un an ou presque, je faisais partie de ceux et celles qui attendaient impatiemment les résultats. Qui avaient cliqué sur envoyer en essayant de ne pas trop y croire mais en y croyant quand même un peu.
Aujourd’hui, un an plus tard ou presque, je fais partie de celles qui ont reçu les nouvelles, qui les ont lues et qui ont essayé de ne pas penser aux espoirs de ceux et celles qui les ont écrites.
Par un bel après-midi ensoleillé, avec mon Mac et mon tableau excel sous le bras, je suis partie rejoindre les filles de Librinova. Qui sont en pleiiiiiin milieu de Paris.
J’ai écouté le GPS me dire « Au rond-point, allez tout droit », alors que j’étais Place de l’Etoile (!!!!) et je suis arrivée à bon port.
Là, dans un café, autour de chocolats chauds et d’expresso (oui après-midi ensoleillé mais pas non plus caniculaire hein), nous avons mis en commun nos ressentis.
34 nouvelles ont été envoyées ! 34 !!! Alors que 2 jours avant la fin on n’en avait reçues seulement 8…
34 nouvelles toutes très différentes, bien que commençant toutes par la même phrase. Des nouvelles plus ou moins longues, des nouvelles drôles, des nouvelles de science fiction, des histoires d’amour, des histoires de vie.
Après délibérations des membres éminents du jury – j’ai nommé : Eva Parutchero du blog Blonde de femme, Marilyse Trecourt auteure Librinova, Charlotte, Laure et Ophélie les éminences de chez Librinova et moi-même – voici les nouvelles gagnantes :
1er prix : Ethylomogies. Nouvelle écrite par Anaïd SAYRIN.
Cette nouvelle est très bien écrite avec une chute très drôle. Le thème imposé est tout à fait respecté. Lecture très agréable.
2ème prix : Copines. Nouvelle écrite par Cécile Saint-Charle.
Cette nouvelle est originale et bien menée. On est rapidement pris par l’histoire et l’on a envie de connaître la fin. Là aussi le thème imposé est bien respecté.
3ème prix : Cinq signes. Nouvelle écrite par Cédric Charbonnel.
Un talent d’écriture certain. De l’humour. Une très bonne chute. Un thème respecté. Présence sur le podium tout à fait logique.
4ème prix : Chaméléon. Nouvelle écrite par John Renmann.
Etrangement (je dis étrangement car je ne m’y attendais pas du tout en fait), nous avons reçu beaucoup de nouvelles de science fiction et/ou d’anticipation. Il était donc logique d’en récompenser une. Celle-ci est bien menée, avec un suspens efficace et une chute qui l’est tout autant. Là aussi le thème est respecté.
5ème prix : Sur un malentendu. Nouvelle écrite par Séverine Solvignon.
Cette nouvelle est agréable à lire, avec de petites touches d’humour. Une histoire toute douce qui fait du bien. Un thème respecté. Un agréable moment de lecture.
6ème prix : Le temps compté. Nouvelle écrite par Floriane Aubin. Et prix de la « controverse ».
Oui, oui vous avez bien lu, 6 nouvelles sont récompensées. Cette nouvelle « le temps compté » n’est pas banale. 3 membres du jury l’ont adorée (dont moi je l’avoue), notamment parce que la chute est vraiment vraiment efficace. 3 membres du jury l’ont moins aimée, justement parce que la chute diablement efficace est un parti pris assez fort.
Du coup, elle nous a fait causer cette nouvelle. Très bien écrite, très bien menée et avec une chute, vous l’aurez compris, controversée. Nous avons donc décidé de la récompenser et de vous laisser apprécier cette fameuse chute. Pour ma part je la trouve énorme et j’avoue que cette nouvelle m’a beaucoup beaucoup plu.
Alors voilà ! Félicitations à tous les auteurs récompensés ! Et merci à tous ceux qui nous ont fait l’honneur de participer, qui ont eu le courage de nous offrir leurs textes. Je sais combien c’est difficile de se soumettre au regard critique.
Les 6 nouvelles récompensées seront donc publiées par Librinova dans un recueil, sans doute dans la journée. Je reviendrai mettre le lien en EDIT du billet.
Et dans ce recueil de nouvelles, vous trouverez un petit cadeau bonus (en tout cas j’espère que vous le prendrez comme un cadeau ;-)) : je me suis également prêtée à l’exercice et ai écrit une nouvelle sur le thème imposé. Membre du jury un jour mais auteure toujours. J’espère que cette nouvelle vous plaira.
Merci à tous ! Et à bientôt j’espère, sur ce blog ou ailleurs.
Un grand merci également à celles qui ont accepté de faire partie du jury (et qui ne s’attendaient pas à 34 nouvelles), mes amies Eva et Marilyse. C’était un plaisir les filles !
Et bien sûr, vous connaissez mon affection pour Librinova, un immense merci à Charlotte, Laure et Ophélie ! Prochaine étape mesdames, trouver un éditeur pour mon roman ! Comment ça je m’emballe ? 😉
EDIT : J’avais promis de revenir publier le lien vers le recueil des nouvelles gagnantes + la mienne en bonus ! Merci à Mr Caillou de me l’avoir rappelé… 😉 Voici donc le lien : http://www.librinova.com/shop/ouvrage-collectif-1/elle-hesita-un-instant-puis-cliqua-sur-envoyer
Alors dépêchez-vous d’aller lire toutes ces supers nouvelles !!!
1 vendredi / 1 nouvelle – Gauche ou Droite
Vous ne rêvez pas. On est vendredi et je publie une nouvelle. Comme au bon vieux temps. C’est lorsque l’on décide d’arrêter les choses que souvent on se rend compte qu’elles nous manquent. J’ai râlé chaque jeudi à l’idée de cette nouvelle à écrire pour le lendemain. Et maintenant que les jeudis et vendredis sont redevenus des jours normaux, je râle parce qu’il n’y a plus de rendez-vous lecture entre nous.
Alors voilà, je me suis mise devant mon écran et je vous ai écrit cette petite histoire. J’espère qu’elle vous plaira. J’espère que vous serez nombreux à la lire. Là encore, comme au bon vieux temps.
Gauche ou Droite.
Elle marchait relativement vite. Il faisait beau alors elle avait décidé de ne pas prendre la voiture. Elle voulait faire une surprise à son mari, passer à son bureau et lui proposer un déjeuner en tête à tête. En terrasse, avec le soleil pour compagnie. Elle se réjouissait à l’idée de ce moment à partager. Elle portait la robe qu’il aimait tant. La rouge avec les doubles bretelles. Celle qui lui faisait des seins pigeonnants. Celle qu’il aimait lui enlever pour lui faire l’amour. Parfois sans attendre d’être chez eux dans l’intimité de leur chambre. Elle rougit au souvenir de la dernière fois où elle l’avait portée. Son désir était ce soir là puissant, impatient. Leur plaisir intense et passionné.
Elle était presque arrivée à destination. Juste au moment de s’engager à droite dans la rue où il travaillait, elle hésita quelques instants à prendre à gauche pour passer récupérer chez le teinturier la veste et les chemises qu’elle y avait déposées il y a deux jours. Et puis, elle se dit qu’elle aurait tout le temps d’y passer dans l’après-midi juste avant de retourner chez eux. Elle prit donc à droite pour le rejoindre. Il était architecte et avait installé ses bureaux quelques mois plus tôt dans cette belle rue dégagée. Un quartier chic comme il se plaisait à le rappeler souvent. Il était fier de sa réussite. Elle était fière d’être sa femme.
Elle pressa le pas, elle n’était plus qu’à une centaine de mètres.
C’est alors qu’elle le vit. Elle esquissa la début d’un sourire, bien vite figé par ce qu’elle avait devant les yeux.
Il était là, superbe dans son costume gris foncé. Celui qui lui donnait cette allure virile et autoritaire.
Mais, il n’y avait pas que lui. Dans son sillage une grande femme brune, jean moulant, talons aiguilles et veste de tailleur. Sa main dans la sienne. Elle s’apprêtait visiblement à partir.
Comme au ralenti, le souffle coupé, elle le vit plaquer cette femme contre lui, sa main droite au bas de son dos, lui écartant de son autre main une mèche de cheveu rebelle, échappée du chignon impeccable. Elle le vit l’embrasser à pleine bouche. En pleine rue. Sans aucune pudeur. Sans aucun respect.
Il tenait cette femme comme il la tenait elle. Il l’embrassait comme il le faisait avec elle. Elle pouvait presque sentir la chaleur de ses lèvres sur les siennes, les frissons que cela lui procurait dans le creux des reins tant l’image lui était familière. La femme brune se dégagea de son emprise et s’éloigna. Lui fit demi tour pour rentrer.
Il tourna légèrement la tête. Leurs regards se croisèrent.
Elle n’avait pas bougé. Elle avait assisté à la scène, incapable du moindre son, incapable du moindre cri. Là dans sa robe rouge, celle qu’il aimait. Elle se sentait à présent ridicule avec son décolleté pigeonnant.
Sans lui donner l’occasion de venir vers elle, elle se mit à courir, à remonter la rue en sens inverse. Aussi vite que le lui permettaient ses sandales à brides, celles qui lui galbaient les jambes. Ca ne pouvait pas être vrai, il devait y avoir une explication. Elle partageait sa vie avec lui depuis cinq ans, elle s’en serait forcément rendue compte s’il avait une maitresse. Il était là tous les soirs, ils sortaient le week-end. Lorsqu’ils allaient diner chez des amis, il la tenait par la taille signifiant bien aux yeux de tous qu’elle était à lui. Et elle aimait ça.
Et pourtant, elle n’avait pas rêvé. Sa bouche sur celle de cette femme. Sa main dans le bas de son dos. Son torse plaqué contre ses seins. Tout cela était bien réel.
Elle courrait depuis plusieurs minutes, à peine essoufflée, sans vraiment regarder où elle allait. Machinalement, elle se retrouva à l’entrée de leur immeuble, devant la porte de leur appartement, au pied de leur lit. Ce lit qu’elle n’avait pas pris la peine de faire ce matin et qui était sans doute encore chaud de leurs étreintes de la veille. Ce lit dans lequel il la faisait se sentir femme.
Elle manquait d’air, il fallait qu’elle s’éloigne, qu’elle réfléchisse, qu’elle tente de trouver une explication. Oui, il devait y avoir une explication. Son regard se posa sur la robe noire qu’elle avait suspendue sur la porte de l’armoire. Ils devaient sortir ce soir. Un diner chez des collègues de travail. Elle se serait faite belle. Il aurait placé son bras autour de sa taille. Il l’aurait faite rire. Si elle ne l’avait pas vu avec la femme brune, ils auraient passé une bonne soirée.
Elle voudrait ne pas avoir eu cette idée de déjeuner. Elle voudrait ne pas savoir. Après tout ce que l’on ignore ne nous fait pas de mal. Maintenant qu’elle savait, elle ne pouvait s’empêcher de se demander depuis combien de temps sa bouche se mêlait à une autre que la sienne. Et s’il n’y avait que cette bouche là. Peut-être qu’il y en avait d’autres. Peut-être qu’il y avait d’autres jeans moulants, d’autres brunes. Peut-être même des blondes.
Elle se baissa pour récupérer une valise sous leur lit. Elle n’avait qu’une envie partir, s’éloigner. Elle ne serait pas l’une de ces femmes trompées et qui font semblant de ne pas savoir. Elle n’était pas de celle qui pouvait partager. Elle savait que jamais plus elle ne pourrait supporter ses mains sur elle.
Elle ouvrit l’armoire, attrapa plusieurs vêtements au hasard. Tout ce qui lui passait sous la main à vrai dire.
– Je peux savoir ce que tu fais ?
Elle sursauta. Elle ne l’avait pas entendu arriver derrière elle.
– Et bien tu vois, là je prends un pantalon, je le plie et je le mets dans ma valise. Je vais ensuite prendre un chemisier et faire la même chose. Ca me paraît clair pourtant.
– Il n’est pas question que tu t’en ailles.
– Et pour quelles raisons ?
– Parce que tu es ma femme. Parce que tu m’appartiens.
A ces mots, elle ne put réprimer un frisson. Son ton était froid, presque métallique. Un ton qu’elle lui avait déjà entendu lorsqu’il parlait affaire. Un ton sans appel.
– Tu as perdu ce droit en fourrant ta langue dans la bouche d’une autre. Oui je suis ta femme mais je ne t’appartiens pas. Ou je ne t’appartiens plus désormais.
– Je ne suis pas de ceux que l’on quitte
– Et moi je ne suis pas de celle que l’on trompe et qui l’accepte sans sourciller.
Elle se tourna de nouveau vers l’armoire. Un pull. Ah et oui un pyjama aussi. Maintenant les chaussures.
La douleur fut instantanée. Fulgurante. Inattendue. Elle poussa un cri et instinctivement couvrit son ventre avec ses mains. Comme pour retenir le sang qui s’écoulait de la plaie. Comme pour retenir la vie qui s’en allait.
– Je te le redis, je ne suis pas quelqu’un que l’on quitte.
1h plus tôt.
Elle marchait relativement vite. Elle voulait faire une surprise à son mari, passer à son bureau et lui proposer un déjeuner en tête à tête. Elle portait la robe qu’il aimait tant. La rouge avec les doubles bretelles. Celle qui lui faisait des seins pigeonnants. Celle qu’il aimait lui enlever pour lui faire l’amour. Elle était presque arrivée à destination.
Juste au moment de s’engager à droite dans la rue où il travaillait, elle hésita quelques instants à prendre à gauche pour passer récupérer chez le teinturier la veste et les chemises qu’elle y avait déposées il y a deux jours.
Une impression de déjà vu. Un pressentiment. Des sueurs froides. Soudainement, elle se sentit mal. La tête lui tournait. Elle s’arrêta quelques secondes pour prendre une profonde inspiration.
Gauche ou droite. Elle hésita.
Et puis finalement, elle prit à gauche.